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L'économie des armes à feu en France

Quelques réalités et spécificités françaises sur l'exportation d'armes

L'armement, une industrie florissante pour la France

Avec 5000 entreprises et près de 400 000 emplois, l'industrie de la Défense est un employeur de poids sur le sol français. La France détient près d'un quart des productions d'armes européennes et se partage la première place des pays exportateurs européens avec l'Allemagne.

Le secteur de l'armement profite d'une dynamique portée par les exportations, puisque, d'après le Ministère de la Défense, près de 40 000 emplois supplémentaires devraient être créés grâce aux récents contrats signés. Ceux-ci portent notamment sur les ventes d'avions Rafales au Qatar et à l'Inde, d'hélicoptères à la Pologne et de bateaux Mistral à l'Egypte.

Cette dynamique a permis de réduire le déficit commercial du pays de 8% entre 2008 et 2013. Les enjeux actuels du marché se trouvent en Asie du Sud-Est et au Moyen-Orient. 

La France a manqué le réveil de l'Asie

Avec l'émergence des Tigres Asiatiques, à savoir la Thaïlande, la Malaisie, les Philippines, le Viêt Nam et particulièrement l'Indonésie, un nouveau marché de l'armement s'est développé.

Grâce à des taux de croissance avoisinant les 5%, l'Asie du Sud-Est a les possibilités de moderniser sa Défense. Si la France a signé quelques gros contrats en 2008 et 2009 avec Singapour (notamment des missiles), elle n'a pas réussi à s'installer comme l'ont fait la Russie, les Etats-Unis et la Chine.

Des clients privilégiés au Moyen-Orient

La France est parvenu à conserver une part de marché durable au Moyen-Orient, une région qui n'a jamais connu la paix, grâce à des accords solides avec l'Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis et, plus récemment, le Qatar. Si la France est loin du volume exporté par les Etats-Unis et la Russie dans la région, elle a réussi à profiter d'une partie de la dynamique de ce marché.

Des régions qui n'ont jamais connu la paix

Bill Clinton aimait le dire, "Suivez les courbes, pas les gros titres".

Une réflexion qui amène quelques surprises lorsqu'on s'interesse de plus près aux chiffres. Avec le conflit Malien dans lequel la France s'est engagé, avec les récents attentats que le monde a subi, et suite à l'intensification des frappes en Syrie, pour ne citer que ceux qui nous touchent de près, la perception d'un monde en guerre n'est que plus forte et les ventes d'armes françaises n'ont jamais été aussi fortes.

Dans ce contexte, on est en droit de se demander à qui la France vend-elle ses armes et quelle politique d'exportation elle a choisi par rapport à ses concurrents. 

Une concurrence des deux côtés du Rhin

Si la France et l'Allemagne sont des concurrents directs pour la troisième place mondiale des plus grands exportateurs d'armes, leurs clients ne sont pas les mêmes. En nous référant au Democracy Index 2015 formulé par The Economist, qui classifie chaque pays selon son degré de démocratie, l'Allemagne semble beaucoup plus regardante sur les gouvernements à qui elle vend ses armes. La France montre qu'elle a moins de principes sur la question.

Quand l’instabilité du monde et le regain des tensions fait le bonheur de la France...

Observer les principaux destinataires des exportations d'armes françaises au cours de la Cinquième République (en place depuis 1958) donne une bonne illustration d'une partie des conflits et transitions politiques intervenues pendant la deuxième moitié du XXème siècle et dont la France a su tirer profit.

Sous le Général De Gaulle, la France vend massivement à l'Allemagne de l'Ouest qui cherche à se reconstruire sous l'impulsion d'Adenauer. Pompidou a profité de l'arrivée au pouvoir de Kadhafi en 1969 en Libye. Sous Giscard d'Estaing, Franco meurt, la dictature des Colonels Grecs tombe et le Maroc est en guerre dans le Sahara. Mitterand vend des armes à l'Irak et à l'Arabie Saoudite dans le contexte de la guerre Iran-Irak et de la guerre du Golfe. Avec Chirac et la fin du XXème, les tensions s'apaisent et les exportations diminuent.

... en particulier dans les pays qui prennent leur population pour cible

Des décennies de commerce irresponsable des armes
Guerre Irak - Iran:

1980 - 1988
1.350.000 morts
La France fut le deuxième fournisseur d'armes de l'Irak, formant des pilotes, permettant aux irakiens d'utiliser la Base d'aéronautique navale de Landivisiau (pour la formation de pilotes) et la Base aérienne de Châteauroux-Déols (pour l'exportation d'armes vers l'Irak) et prêtant même cinq Dassault Super-Étendard (lors de l'opération Sugar) de sa marine en attendant que les Mirage F1 commandés soient livrés.La France avait également conclu un contrat pour la vente de trente-six Mirage à l'Irak en 1977, à l'occasion d'une visite du premier ministre Raymond Barre à Bagdad. Ce contrat sera honoré dès 1981 avec la livraison de quatre mirages F1. Selon l'historien Pierre Razoux :

 

"Pendant toute la durée de la guerre, la France va s’imposer comme le second pourvoyeur d’armes de l’Irak, derrière l’Union soviétique, en lui livrant 121 Mirage F-1, 56 hélicoptères de combat, 300 véhicules blindés, 80 canons automoteurs GCT-AUF1, du matériel antiaérien et antichar de dernière génération, des milliers de missiles et des millions d’obus et munitions diverses."


En parallèle, la France a fourni secrètement à l'Iran (le camp adverse) environ 450 000 obus d'artillerie de 155 et 203 mm de la société Luchaire entre 1982 et 1986 ainsi que des pièces détachées pour des missiles sol-air Hawk, que ce soit avec l'accord du gouvernement français dans le cadre du règlement des affaires des otages français au Liban et du contentieux financier franco-iranien Eurodif ou non avec l'aide de sociétés écran en Espagne ou au Portugal.

 

Comment la France est devenue "fournisseur" de l'Etat Islamique ?

Les stocks de l'armée irakienne ont gonflé à la fin des années 1970 et au début des années 1980, dans le contexte de cette guerre. En 2003, pendant et après l'invasion du pays par la coalition dirigée par les États-Unis, l'Irak a de nouveau été submergé par les flux d'armes. La plupart n'étaient pas sécurisés ni dûment contrôlés par les forces de la coalition et les forces irakiennes reconstituées. En juin 2014, les combattants de l'EI se sont emparés de tout un arsenal d'armes issues des stocks irakiens mais produites à l’étranger, notamment des armes et véhicules militaires . Ces prises d’armes leur ont permis de poursuivre leur conquête d'autres régions en s’en prenant aux populations civiles.

Quels sont les effets du commerce des armes?

Nombre de victimes, conflits armés, enfant-soldats. Voici des faits terrifiants sur le commerce irresponsable des armes.

 

La valeur enregistrée de l'industrie des armes avoisine actuellement les 100 milliards de USD $ par année - en 2010, le chiffre était d'environ 80 milliards $, c’est donc un business qui se développe très rapidement.

 

Sans surprise, il y a plusieurs faits choquants associés à la vente d’armes:
• Plus de 1500 personnes sont tuées chaque jour par les conflits et la violence armée.
• Il existe plus de lois internationales régissant le commerce des bananes que des armes.
12 milliards de balles sont produites chaque année.
• Plus de 26 millions de personnes ont fui leurs maisons par crainte pour leur vie en raison d'un conflit armé.
• Des dizaines de milliers d'enfants soldats sont utilisés dans les conflits armés dans plusieurs pays.
• En détruisant les infrastructures, les armes  limitent l'accès à la nourriture, l'eau et un abri, poussant les survivants dans la pauvreté.
64% des armes du monde sont fournies par quatre pays: Etats-Unis (34,84%), la Russie (14,86%), l'Allemagne (7,43%), la France (6,57% ).

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